Le père de Marcel Barbeault était cheminot et sa mère travaillait dans le textile. Aîné de la famille, il semble avoir eu une enfance normale. Décrit comme timide et renfermé, il quitta l’école à 14 ans après avoir raté son certificat d’études primaires.
A 19 ans, le 13 décembre 1960, il s’engagea pour deux ans dans l’armée afin de partir se battre en Algérie, où la guerre faisait rage depuis 6 ans. Au lieu de devenir parachutiste, il se retrouve brancardier. Le 19 décembre 1962, il fut démobilisé et de retour en France, Marcel Barbeault désire devenir gendarme, mais échoue lors des épreuves de sélection.
A 21 ans, il rencontra Josiane, ils se marièrent rapidement et eurent deux fils, en 1966 et 1972. Le couple s’installa dans le quartier des Martinets, à Montataire. Malheureusement, la vie de Barbeault va être marquée par des drames avec le décès de sa mère en 1968, celui de l’un de ses frères en 1971 et le suicide, dans des circonstances troubles, d’un autre en 1974. Après coup ces décès donnent l’impression d’avoir fait basculer Marcel, les meurtres commençant peu après celui de sa mère, brune comme les victimes du tueur de l’ombre.
Parcours criminel
Le soir du 10 janvier 1969, Françoise Lecron, épouse d’un ingénieur de l’usine Saint-Gobain, fait la cuisine dans sa maison et est surpris par une détonation. Elle prend une balle de carabine dans l’épaule, tirée à travers la fenêtre de son pavillon. La police penche pour un acte d’intimidation sur son mari, l’un des cadres dirigeants de la société Saint-Gobain.
Quatre jours plus tard, Michèle Louvet, 17 ans, regagnant le domicile de ses parents dans la soirée, entend elle aussi une détonation. Elle est atteinte au ventre mais survie. La police fait le rapprochement entre les deux agressions et la presse locale baptise le tireur inconnu « Le tueur de l’ombre ».
Une semaine plus tard, le 23 janvier au soir, Thérèse Adam, une représentante en cosmétique âgée de 49 ans, se fait agresser en regagnant son domicile. Elle se fait assommer par un homme lui tire une balle de calibre 5.5 dans la nuque. Son corps est retrouvé le lendemain par un passant.
Alors que presque un an s’est écouler et que « Le tueur de l’ombre » a pratiquement réussi à se faire oublier, le 16 novembre 1969, une mère et sa fille se font agresser à leur domicile par un homme au visage dissimulé. Il les entraîne à l’extérieur, les sépare et tue la mère d’une balle dans la tempe. Sa fille, Micheline, 19 ans, réussi à s’enfuir. Elles donnent aux policiers du commissariat de Creil, la description du tueur, grand, bien bâti et avec des « yeux de chat ». La police établit un lien entre les quatre agressions et le « tueur de l’ombre » fit de nouveau la une des journaux.
Pendant plus de trois ans, il ne fit plus parler de lui, jusqu’au 6 février 1973, date à laquelle il fit une nouvelle victime, Annick Delisle, 29 ans, retrouvé à demi nu à quelques pas du centre de Nogent. Le tueur l’avait assommée avant de l’achever d’une balle de 22 long rifle dans la nuque.
Quelques mois plus tard, le 29 mai 1973, on retrouve les corps d’Eugène Stephan, 25 ans, et Mauricette Van Hyfte, 23 ans, en contrebas du cimetière de Laigneville. Les deux amoureux avaient été assommés et tués de plusieurs balles de carabine 22 long rifle.
Il attendit de nouveau six mois avant de commettre un nouveau crime, le 8 janvier 1974, celui de Josette Routier, 29 ans, assassinée à son domicile de Nogent-sur-Oise. Assommée d’un coup de matraque derrière la tête, elle a été tuée par deux balles de calibre 5.5 dans la tempe. Ses sous-vêtements lui ont été arraché. Son corps ne fut découvert que trois jours plus tard. Ce meurtre présentait une particularité, l’utilisation d’un couteau dans un but sexuel. C’était la première fois que le tueur montrait un intérêt clairement sexuel pour sa victime.
Alors qu’il récupérait le butin d’un cambriolage, Marcel Barbeault est arrêté en flagrant délit par les gendarmes, le 3 septembre 1974. Il reconnait les faits et à son domicile les enquêteurs découvrent un important butin, ainsi qu’un pistolet d’alarme transformé en revolver de calibre 5.5 à balles réelles. il fut condamné à un mois d’emprisonnement à la maison d’arrêt d’Amiens mais la relation avec le tueur de l’ombre ne fut pas faite.
Le 26 novembre 1975, un habitant de Nogent-sur-Oise vient déclarer la disparition de sa nièce, Julia Gonçalves, 29 ans. Le lendemain, un employé municipal retrouve le corps de la jeune femme sur la berge du ruisseau du jardin public. Elle était dévêtue des genoux à la poitrine et probablement morte depuis deux jours. Assommée d’un violent coup à la tête elle a été achevée d’une balle de carabine dans la nuque. Cette fois-ci un témoin a aperçu un homme immobile caché dans les feuillages, vêtu de sombre, plutôt beau garçon, avec des cheveux noirs et un regard marquant.
Au matin du 6 janvier 1976, un homme se jette soudain sur Françoise Jakubowska, 21 ans, et lui assène un coup de matraque derrière la tête. Il lui porte ensuite plusieurs coups de poignard dans la poitrine avant de l’achever avec un coup de carabine 22 long rifle dans la tempe. Il la dénude des genoux à la poitrine puis disparaît sans laisser de trace. Son corps sera découvert en début d’après-midi.
Après une dénonciation anonyme, le commissaire Jacob reprend le dossier à son début et fait de multiples recoupements pour aboutir à une liste de cinquante noms. Le cinquième de la liste sera le bon, il se nome Marcel Barbeault.
Le 14 décembre 1976, une perquisition fut ordonnée à son domicile. Aucune pièce à conviction ne fut trouvée dans son appartement. Mais, dans la cave ils découvrirent une carabine 22 long rifle de marque Gekado, un poignard de commando, un tube ayant pu servir de matraque et un ciré de pêcheur. Il sera interpellé vers midi en rentrant chez lui.
Enquête et procès
Marcel Barbeault était une personne au comportement tout à fait banal, ce qui lui a permis pendant des années de passer à travers les mailles du filet de la police. Même son arrestation en septembre 1974 pour cambriolages ne mit pas la puce à l’oreille des enquêteurs.
Hasard du calendrier, le même mois l’inspecteur divisionnaire Daniel Neveu est muté à Creil et l’affaire lui est confiée. Contenant très peu d’indices, celle-ci s’avère compliquée et il commence par essayer de comprendre le raisonnement du tueur. Il remarque que les crimes ont été commis selon un rituel précis, à savoir de nuit et dans le froid, à l’aide d’un coup de matraque, suivis d’un coup de feu et à chaque fois sans mobile apparent. Un profil fut vite établi et l’inspecteur Neveu était persuadé que le suspect était un voyeur mais aussi un cambrioleur.
Seul le double meurtre du cimetière ne semble pas coller aux habitudes du tueur. Pour l’inspecteur Neveu celui-ci n’était donc pas prémédité mais un meurtre d’opportunité. Partant de ce principe il prend en compte que le cimetière pourrait être lieu fréquenté par le tueur. Notamment parce qu’une balle 22 long rifle a aussi été retrouvé à côté d’un robinet d’eau, peu accessible, du cimetière.
Par la suite un appel anonyme donna de nombreux indices sur le tueur qui s’avéreront exact. Mais c’est surtout après un laborieux travail de recoupement et de multiples vérifications, que l’inspecteur arrive, au mois de novembre 1976, à seulement 50 noms de suspect.
Après quatre premier suspect écartés, le 14 décembre 1976, une perquisition est ordonnée au domicile de Marcel Barbeault. Aucune pièce à conviction n’est trouvée dans son appartement mais, dans la cave, ils découvrent de nombreux éléments à charge. Il sera interpellé vers midi en rentrant chez lui.
Sa ressemblance avec le portrait-robot, et surtout la carabine 22 long rifle et le poignard de parachutiste trouvés dans sa cave, témoignent contre lui. Mais Barbeault réfute en bloc les accusations tout au long de l’interrogatoire. Même si une des victimes le reconnait formellement, ainsi qu’une femme de ménage de 35 ans, qui déclare avoir été suivie, à plusieurs reprises. Dans son témoignage, elle évoque d’ailleurs, comme les deux autres témoins, le regard perçant de l’homme. L’inspecteur trouve aussi le lien qu’il avait imaginé, la mère de Marcel était enterrée dans le cimetière de Nogent depuis 1968.
Les conclusions du laboratoire scientifique sont par ailleurs accablantes et lie sans aucun doute possible, la carabine 22 long rifle, retrouvé chez Barbeault, avec celle qui a tuée Françoise Jakubowska le 6 janvier 1976. Malgré tout, il continue de nier déclarant avoir volé l’arme bien après la date du crime.
Marcel Barbeault ayant déjà été condamné pour cambriolage dans le passé, la police reprit la liste de tous les cambriolages dans la région et en découvrit un avec vol d’une carabine. Les enquêteurs purent retrouver des douilles et démontrer que celles-ci avaient servi à d’autres meurtres du tueur de l’ombre. Le cambriolage fut imputé à Barbeault et donc les meurtres liés à la carabine volé également.
Après cinq ans d’instruction, le procès de Marcel Barbeault s’ouvre au Palais de justice de Beauvais le 25 mai 1981 devant la cour d’assises de l’Oise. Il est poursuivi pour cinq meurtres, les trois autres attribués au tueur de l’ombre n’ont pu être retenus contre lui faute de preuves. Il niera toujours être le tueur de l’ombre, malgré de lourds éléments à charge et les témoignages oculaires.
Marcel Barbeault, coupable de seize cambriolages, deux meurtres et trois assassinats, est condamné le 10 juin 1981 à la réclusion criminelle à perpétuité. S’étant pourvu en cassation, il est rejugé en novembre 1983 et de nouveau condamné à la prison à vie.
Aujourd’hui encore, Marcel Barbeault, nie être l’auteur des meurtres de Nogent. Néanmoins, après l’arrestation de Marcel Barbeault, plus aucun meurtre du « tueur de l’ombre » n’eut lieu. Faute de preuves matérielles tangibles, les trois premiers meurtres commis à Nogent, ceux de Thérèse Adam, de Suzanne Mérienne et d’Annick Delisle ne furent donc officiellement jamais élucidés.
Profil criminel
Les psychologues vinrent se prononcer à la barre sur le l’état mental de Marcel Barbeault. Ils conclurent tous qu’il était intelligent et qu’il n’était pas un malade mental. Un être renfermé, un peu fruste, avec des tendances morbides, certes, mais dont l’état n’avait rien de pathologique. Un homme normal.
Marcel Barbeault est un tueur à la personnalité atypique pour un tueur en série. Avant son arrestation il n’avait passé qu’un mois en prison et était dépeint comme un homme normal par tous le monde.
Il abattait ses victimes à l’aide d’une arme à feu, une carabine 22 long rifle. Il les déshabillait sans, toutefois, les violer, et les dépouillait, fait plutôt rare chez les tueurs en série.