C’est un voisin qui a averti la police, hier vers 21h30. Alerté par une proche de la famille inquiète de ne pas avoir de nouvelles, il s’est rendu chez eux. Trouvant la porte ouverte, il a pu entrer et a découvert les quatre corps des membres de la famille, pendus dans leur véranda.Le parquet de Boulogne qui mène l’enquête se dirige vers la piste du suicide collectif. Aujourd’hui, le village de Coulogne est sous le choc. »Sans histoires et serviables » selon des voisins, les parents d’une soixantaine d’années vivaient avec leur fils et leur fille de 28 et 27 ans.
Selon des proches, le père avait pris sa retraite l’an dernier et les enfants éprouvaient des difficultés à trouver du travail. Le fils avait essayé de créer une entreprise de transport de colis, sans succès. Selon le procureur de Boulogne-sur-Mer, les Demeester pourraient avoir mûri leur pacte suicidaire. ANGÉLIQUE DEMEESTER a menti. Ce n’est certes qu’un détail, mais il chiffonne les policiers chargés d’élucider le quadruple suicide de Coulogne. Lundi 24 septembre, au beau milieu de l’après-midi, cette femme de ménage âgée de 27 ans quitte brusquement son travail, vraisemblablement pour rejoindre le domicile parental. Afin de justifier ce départ précipité, elle invoque un accès de gastro-entérite. L’autopsie de son corps, réalisée depuis à Boulogne-sur-Mer, révèle pourtant qu’elle n’était nullement souffrante lorsqu’elle s’est pendue peu après, en compagnie de son frère et de ses parents.
« Ce constat nous trouble, concède le procureur de la République Gérald Lesigne, car il donne le sentiment qu’un événement survenu en début de semaine dernière a brusquement donné le signal pour mettre à exécution un projet suicidaire longuement mûri. »
Pour seul indice, une main encore inconnue a laissé une longue lettre non signée, au bas de laquelle on peut lire : « Pardon, on a trop déconné. » Dans l’étroite allée des Frênes, enveloppée de brume et coincée contre un terrain de foot près duquel plusieurs vaches paissent sereinement, le voisinage se perd en conjectures, suspendu au résultat des divers examens en cours. Déjà, les relevés de température effectués sur les corps ont permis d’établir que les pendaisons sont intervenues 24 à 48 heures avant leur découverte, jeudi 27 septembre.
En début de semaine, les autopsies n’ont mis en évidence aucune trace de violence. De surcroît, la détection de lésions superficielles au niveau des chevilles des quatre cadavres, occasionnées par leurs convulsions respectives, a convaincu le légiste que les Demeester se sont pendus de façon simultanée – les uns en sautant dans le vide, les autres en se laissant glisser, depuis des caisses ou des tabourets. La semaine prochaine, des analyses toxicologiques détermineront si certains membres de la famille ont absorbé des médicaments avant de passer à l’acte, comme le laisse supposer la découverte de plusieurs plaquettes vides de médicaments sédatifs à proximité de la scène de crime.
« Ces comprimés avaient été prescrits au père de famille ainsi qu’à son fils, qui étaient tout deux suivis pour une dépression depuis plusieurs mois », précise une source proche de l’enquête.
Depuis une semaine, les policiers de Calais s’attachent à cerner l’état psychologique dans lequel chaque membre de la famille se trouvait au moment du quadruple suicide. Outre René et son fils Olivier, il apparaît en effet que la mère, Marie-Christine, se plaignait depuis peu d’être « dépressive ». Par ailleurs, plusieurs proches ont indiqué aux policiers s’être inquiétés du « décrochage » récemment vécu par les Demeester. Signes de fragilité Titulaire d’un DESS, Olivier, 30 ans, semble avoir le premier montré des signes de fragilité lorsque, au printemps, il a soudain fermé sa société de transports de colis, constituée un an plus tôt, sans jamais avoir vraiment lancé son activité.
« Il semblait pourtant très fier de son camion, raconte Nathalie Clerbout, une voisine. Chaque soir, il sortait en pyjama de chez ses parents pour dormir dedans afin qu’on ne le vole pas. »
Ces dernières semaines, Angélique Demeester s’est semblablement renfermée en quittant son petit ami, avec qui elle projetait jusqu’alors d’avoir un enfant.
« Elle avait beau s’être installée seule à Calais, on la voyait chaque jour rentrer déjeuner chez ses parents, comme si elle n’arrivait pas à partir », précise un voisin.
Jadis bien impliqué dans la vie sociale de Coulogne, le père, enfin, s’était récemment replié en décidant brusquement de quitter la troupe de théâtre dont il faisait partie l’an dernier. Ces derniers jours, l’examen des comptes bancaires de la famille, créditeurs, a permis d’exclure un mobile purement financier.
« Avant de refermer ce dossier, il est désormais important de comprendre la concomitance entre ces différents renoncements, explique le procureur Lesigne, qui a ouvert une information judiciaire pour»recherche des causes de la mort. Même s’il n’y a pas eu d’intervention physique, nous ne voudrions pas passer à côté d’une éventuelle manipulation mentale qui pourrait avoir été exercée soit au sein de la cellule familiale, soit depuis l’extérieur. »