Hélène Denis contemple avec ravissement la maisonnette aux murs tout blancs, dont les lignes nettes se découpent sur un fond de verdure sauvage. Dépassant du toit de tuiles, le cyprès, planté dans l’arrière-cour lui fait un chapeau baroque aux sombres couleurs. Ca et là, l’envol aérien des fleurs de cerisiers dont la blancheur masque à peine la corniche droite du mur. Il n’y a pas de doute, c’est un endroit de rêve où l’on ne peut être qu’heureux…Si c’était possible, elle s’installerait sur-le-champ dans cette demeure.

« Elle te plaît n’est ce pas ? » lui chuchote René son mari.

Puis, s’adressant au propriétaire

« Nous sommes acheteurs ».

Le propriétaire de répondre :

« Je peux vous la céder immédiatement si vous le voulez. C’est moi qui l’ai construite. Et je n’ai pas encore eu le temps de terminer les travaux. Mais je veux bien vous la vendre, maintenant. Je vous ferai un prix bien sur… ».

Hélène folle de joie, presse son mari de conclure le marché. Elle va de surprise en surprise. Le décor est aussi séduisant à l’intérieur qu’à l’extérieur. La cheminée du salon, les vastes chambres du premier étage, dont les fenêtres ouvrent sur la montagne niçoise la séduisent tout autant que le jardin. Emportée par son enthousiasme, elle ne pense pas un seul instant à s’étonner du prix singulièrement bas de la propriété, ni de l’empressement extrême du vendeur à conclure l’affaire. En ce jour de printemps 1970, elle ne se doute pas qu’elle vient de signer un pacte avec le Diable. La bâtisse aux dehors si riants, renferme de redoutables sortilèges. Mais, comment Hélène devinerait-elle la présence en ces lieux, de mauvais esprits prêts à tout pour préserver leur refuge…?

La vente s’est déroulée de la manière la plus banale possible. C’est le fils d’Hélène, Thierry, qui a noté le numéro de téléphone du propriétaire, en passant devant une maison à vendre. Il en a parlé à sa mère qui a téléphoné aussitôt. Hélène, depuis longtemps, en effet est décidée à quitter l’appartement familial, à trouver un bout de jardin et un peu d’air pur. Son mari, journaliste, a pris sa retraite il y a deux ans. Elle-même a cessé d’exercer son métier de sage-femme. La maison correspond en tout point à ce qu’elle recherche. René et les deux entfants, Thierry et Géraldine, sont enthousiastes eux aussi.

« En attendant que les travaux soient terminés, nous irons passer les week-ends là-bas….décide le père. Plus tard nous y emménagerons… ».

Ainsi est fait. La famille Denis passe un dimanche de rêve dans le jardin et jusqu’à la nuit, on reste attablés à côté du barbecue à regarder le soleil disparaître derrière la montagne. Quand Hélène ferme les volets de sa chambre, elle jette un dernier coup d’oeil aux branches fleuries du cerisier, qui viennent frôler le mur. Le lendemain matin, elle pousse une exclamation d’horreur. René réveillé en sursaut, vient la rejoindre à la fenêtre. L’arbre n’est plus qu’un squelette noir et nu, dressant désespérément vers le ciel des branches désséchées commes aux pires moments de l’hiver.

« Nous n’y comprenions rien dit-elle aujourd’hui. L’arbre avait l’air aussi sec que si un incendie l’avait dévasté. Pourtant la température n’avait pas changé, pendant la nuit. J’ai appelé un paysan du coin et il était stupéfait ».

« Je n’ai jamais vu cela » s’exclama-t-il.

Les préoccupations quotidiennes leur font vite oublier tout cela et il se retrouvent le week-end suivant, aussi heureux d’être dans la maison que la première fois. Très vite ils choisirent leur chambre respectives, meublèrent la maison, et firent des petits travaux. René s’approprie un vieux fauteuil, près de la cheminée. Il y reste des heures à lire le journal ou à faire des mots croisés, pendant que son épouse jardine ou prépare le repas. Un jour, alors que l’homme est plongé dans la lecture d’un roman policier, la voix de sa femme le fait sursauter :

« Mais qu’est ce que c’est que cette odeur ? Tu ne remarques rien ? Ca sent le rat crevé…! ».

Perplexes les deux époux examinent le fauteuil, le parquet…L’odeur de cadavre, soudain, est partout : sur le sol, le long des murs. Bientôt, elle s’étend à toute la maison :

« C’est peut-être une histoire de fosse septique dit Hélène. Il faudra la faire contrôler. »

. Après vérification, il faut bien se rendre à l’évidence, tout est en bon état. Et l’horrible odeur, pourtant reste collée aux murs….Tous les nettoyants au monde n’y font rien. Puis, une nuit, d’étranges phénomènes se déclenchent. Hélène , réveillée en sursaut, entend les marches de l’escalier craquer. Des chuchotements se font entendre. Elle se lève, se rend sur le palier. Rien. Il n’y a pas âme qui vive. Et les portes donnant dehors – elle va vérifier – sont bien fermées de l’intérieur.

– Tu a entendu maman ? demande Thierry, le lendemain, au petit déjeuner. Il y avait des bruits bizarres dans la maison cette nuit. J’ai même entendu des grincements de chaînes. »

Géraldine, sa fille, acquiesca les dires de Thierry, elle aussi ayant entendu de curieux bruits. Mais Hélène ne rit pas. Elle se remémore à présent ce que lui avait dit le propriétaire, peu de temps après la vente de la maison. Et des frissons parcoururent son corps…

« Je veux m’en aller, lui avait-il avoué, car ma fille est tombée malade dans cette demeure. Elle avait de violents maux de tête. On a dû l’hospitaliser, et, 24 heures plus atrd, elle est décédée d’une méningite ».

Hélène avait d’abord pensé que le père égaré par la douleur, avait déliré sur cette histoire malheureuse et elle avait écouté ce récit d’une oreille distraite.

« A l’enterrement de ma fille, avait-il dit, mon neveu, un garçon de 28 ans, a passé quelques jours ici, avant de rentrer en Italie. une semaine plus tard son départ, j’apprenais qu’il était décédé d’une leucémie. Et ce n’est pas tout. Mon propre frère, après avoir fait un court séjour dans ces murs, est à son tour tombé malade. Il est mort à peine rentré chez lui. C’est pour cela que je vend. Pour oublier tous ces deuils… »

Hélène est à présent troublée..Et si la maison était hantée..? Décidée à en avoir le coeur net, elle se met à fouiller la bâtisse de fond en comble avec les enfants. Ils cherchent un indice, quelque chose susceptible d’expliquer ces bruits et ces étranges odeurs. De la cave au grenier, tout est exploré sans que l’on trouve quoi que ce soit d’étrange. Et pourtant, la nuit, les grincements de chaînes résonnent de nouveau, et, du toit, se fait entendre le bruit éclatant de pierres roulant sur les tuiles. Hélène se précipite à la fenêtre. Il n’y a personne, le toit est désert. Mais le berger allemand, si prompt, depuis toujours à montrer les dents au moindre visiteur, devient craintif et va se réfugier piteusement sous le lit de ses maîtres. Les mois passent. Peu à peu on s’habitue à ces incroyables phénomènes et l’on renonce à en chercher l’explication. Un jour, René décide de cimenter le sol du garage. Le maçon qui va s’y employer travaille pendant une semaine. L’oeuvre achevée, il rentre chez lui en voiture. Il n’y arrivera jamais. Il percute un arbre et il est tué sur le coup. Hélène saura, par les gens du pays, qu’il n’était pas buveur et qu’il était, de surcroit, excellent conducteur. Quelques temps après, les Denis décident de faire installer une chaudière dans la maison. L’ouvrier travaille vite et bien. Après avoir posé l’appareil il s’en va en disant à Hélène :

« Je reviendrai demain, pour la facture. Je regarderai en même temps si tout va bien ».

Mais le matin, Hélène s’aperçoit que la chaudière s’est arrêtée pendant la nuit. Aussitôt elle appele le réparateur. Un voie féminine lui répond :

« Mon mari est mort cette nuit d’une crise cardiaque »…!

René est bouleversé :

« En tant que propriétaire de la maison, dit-il, je suis le premier visé. Il vaut mieux partir, avant que ce ne soit trop tard… »

Et comme par une incroyable coïncidence, il semble qu’on s’en prenne maintenant à lui. Une nuit, un fracas énorme réveille la famille. Cela vient du garage. Hélène et René s’y précipitent. Le spectacle est impressionnant. L’établi de René a été arraché du mur et ses outils gisent sur le sol, à l’autre bout du local, comme s’ils avaient été lancés violemment par une main vengeresse…A pertir de ce jour, les Denis ont peur. Le curé du village est invité à exorciser la maison. Mais ses prières n’y font rien. La nuit, la clochette de l’entrée se met à tinter sans raison, les bruits, les huchotements recommencent. En septembre 1973, c’est le drame. René tombe malade. Hospitalisé en octobre au C.H.U. de Nice, il meurt en février 1974 d’un cancer généralisé.

« Je vais y passer ne cessait-il de répéter sur son lit d’agonie, je l’avais bien dit ».

Hélène, après avoir veillé son époux jusqu’à la fin, rentre chez elle, brisée par le chagrin. En pénétrant dans le salon, elle reste clouée sur place de stupeur. Un désordre extrême règne dans la pièce. Le vaisselier vidé de son contenu, est ouvert. Verres et assiettes trainent sur le parquet, brisé en mille morceaux. Un ouragan n’aurait pas fait mieux. L’horloge qui avait toujours parfaitement fonctionné et qu’elle avait elle-même remontée la veille est arrêtée. Les deux aiguilles indiquent l’heure de la mort de René.

Le lendemain, la maison se met à trembler sur ses bases. Hélène affolée, se précipite chez le fermier voisin, à 400 mètres de là. Elle est accueillie avec étonnement :

« Vous avez dû rêver lui dit-on. Nous on a absolument rien ressenti comme secousse…! ».

Alors elle prend la décision. Dans la semaine, la propriété est mise en vente par l’intermédiaire d’une agence. Et Hélène, dont les enfants sond grands maintenant, décide de s’installer du côté de Rapp, dans l’arrière pays niçois. Elle va voyager, pour oublier cette tragédie. Mais son fils, devenu géologue, poursuit sa propre enquête. Il va découvrir que la maison hantée a été construite sur un cimetière romain. Il trouvera même des pierres tombales enfouies dans le jardinet. Cette découverte semble bien rejoindre les paroles qu’un médium prononça un jour à Venise en rencontrant Hélène :

« Vous vivez dans une maison tourmentée par les esprits : partez vite, vous êtes en danger. Il ne faut pas déranger les morts, sinon il se révoltent et vous jettent des sorts ».

Un peu imagée comme réflexion, un peu enfantine….Mais bon…!

Il y a de quoi impréssionner les prochains occupants de cette maison, sur la montagne niçoise…

Reynald
Author: Reynald

J'ai crée ce site en 2004 car j'étais un passionné de paranormal et je voulais partager ma passion avec les gens qui ont la même passion. Bonne lecture.

By Reynald

J'ai crée ce site en 2004 car j'étais un passionné de paranormal et je voulais partager ma passion avec les gens qui ont la même passion. Bonne lecture.

2 commentaire sur « LA MAISON HANTEE DE NICE »
  1. Bonjour, j’ai lu votre histoire et j’adore ça. Je vis à Nice et juste par curiosité, j’aimerais savoir où se trouve cette maison s’il vous plait. Merci d’avance pour votre réponse.

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