L’affaire Robert Boulin est le nom de l’information judiciaire diligentée à la suite de la mort suspecte de Robert Boulin, alors ministre du Travail en exercice du gouvernement français. Le corps du ministre est découvert le 30 octobre 1979 dans l’étang Rompu de la forêt de Rambouillet à Saint-Léger-en-Yvelines.
L’information judiciaire conclut en 1991 à un suicide dû à une transaction immobilière « irrégulière ». La famille de Robert Boulin, notamment sa fille Fabienne Boulin-Burgeat, est convaincue que son père a été assassiné. Son combat est relayé d’abord par de nombreux journalistes, puis repris, dans les années 2010, par des personnalités du monde artistique réunies autour de Pierre Aknine pour le téléfilm Crime d’État, qui montre que le Service d’action civique (SAC) d’Achille Peretti, Charles Pasqua et Jacques Foccart a commandité l’assassinat dans la crainte que Robert Boulin ne dévoile le réseau de fausses factures participant au financement du RPR.
À la suite de plusieurs nouveaux témoignages, l’enquête judiciaire est réouverte pour « arrestation, enlèvement et séquestration suivis de mort ou assassinat » le , quelques semaines après la mort de Charles Pasqua.
Quel était le contexte de sa mort ?
A l’époque, Robert Boulin était pressenti pour succéder à Raymond Barre à Matignon. Quelques semaines avant que son corps soit découvert, il avait été mis en cause dans une affaire – dite « de Ramatuelle » – d’acquisition irrégulière d’un terrain dans le Var. Il faisait l’objet d’une virulente campagne de dénigrement, relayée par la presse.
Son suicide a été attribué à une dépression due à cette affaire. Blanchi après sa mort, Robert Boulin, pour répondre à ces accusations, aurait constitué des « dossiers » sur des affaires troubles de son parti, le RPR, qui aurait orchestré les révélations à son encontre dans la presse. Il s’apprêtait à les poster avant d’être retrouvé mort.
Pourquoi sa mort pose-t-elle question ?
- Une première autopsie contestable
Lors de la première autopsie, le procureur avait donné l’ordre aux médecins légistes de ne pas ouvrir le crâne – qui présentait pourtant des traces de coups –, avançant le refus de la famille, qui n’a pourtant jamais formulé son opposition.
En 1983, une seconde autopsie révèle des fractures au visage non mentionnées par la première, ainsi que des soins d’embaumement que la famille n’avait pas autorisés.
Par ailleurs, malgré la thèse péremptoire de la noyade dans l’étang Rompu, aucune analyse n’a été faite du contenu des poumons de Robert Boulin ; analyses qui auraient permis d’attester de la présence ou non d’eau de l’étang.
- Disparitions de pièces cruciales du dossier
La famille avait porté plainte en 1988 pour destruction de preuves alors que les poumons de la victime, censés être sous scellés à l’institut médico-légal, avaient disparu, tout comme d’autres organes et les analyses sanguines (qui ne révélaient aucune trace de barbituriques).
Par ailleurs, la veille de sa disparition, Robert Boulin avait quitté son domicile en emportant des dossiers qui n’ont jamais été retrouvés, pas plus que la demi-douzaine d’enveloppes à en-tête du ministère du travail qu’un postier de Montfort- l’Amaury, dernier endroit où a été vu Robert Boulin, avait relevées ce jour-là.
- Des incohérences dans l’explication de sa mort
La reconstitution n’a jamais eu lieu, et la chronologie paraît « troublante » à la fille de la victime. Le corps a été découvert à 8 h 40 le 30 octobre, alors que le premier ministre de l’époque, Raymond Barre, a écrit avoir été averti de la mort de son ministre à 3 heures du matin.
A 9 h 45, l’Agence France-Presse officialise son « suicide » après « l’absorption de barbituriques » alors qu’aucune enquête n’a été diligentée.
En outre, M. Boulin a été déclaré noyé dans l’étang Rompu, alors que son pantalon et ses chaussures ne portaient pas de traces de vase, et qu’il avait la bouche fermée lorsqu’il a été retrouvé.
Plus troublant encore, en 1988, il a été démontré que le corps avait été déplacé après sa mort.
Des documents « secret défense » sur la mort de Robert Boulin pourraient bientôt être déclassifiés, à la demande du juge qui instruit cette affaire.
Le feu vert des ministres de l’Intérieur et de la Défense
D’après les informations recueillies par Benoît Collombat, journaliste à Radio France pour l’émission Secrets d’Info, le juge qui instruit l’affaire a demandé aux ministres de l’Intérieur et de la Défense de sortir de leurs archives tout ce qui concerne la mort de Robert Boulin. Une déclassification qui permettra peut-être d’en savoir plus, 37 ans après la mort de l’ancien ministre.
Fabienne Boulin, la fille de Robert Boulin, est convaincue que les services secrets français détiennent des éléments sur la mort suspecte de son père. C’est la raison pour laquelle, le juge Etienne Lesaux, le magistrat qui a repris l’enquête, a officiellement sollicité les deux ministères. Le 20 décembre 2016, Bruno Le Roux, ministre de l’Intérieur, a donné son feu vert à la transmission de documents, tout comme la Division des affaires pénales militaires, le 6 janvier dernier.
Source : wikipedia , http://www.francetvinfo.fr , http://www.lemonde.fr