En février 2013, le cadavre d’une canadienne d’origine hongkongaise est retrouvé dans un hôtel de Los Angeles. Son décès a été fortement médiatisé car il prend place au sein de l’hôtel Cecil, le dernier lieu connu pour Elizabeth Short (le Dahlia Noir) ou encore pour Goldie Osgood, la » femme au pigeon de Pershing Square « .
Une histoire sortie tout droit d’un film d’horreur. Huit ans après l’affaire Elisa Lam, Netflix ravive les mémoires avec une série documentaire intitulée Scène de crime : La Disparue du Cecil Hotel. En 4 épisodes, Joe Berlinger – réalisateur de Ted Bundy : Autoportrait d’un tueur – investigue le fait divers avec l’aide de nombreux témoignages et apporte de vraies réponses pour démystifier une énigme qui continue de fasciner le monde. La célèbre vidéo de surveillance, qui marque la dernière apparition d’Elisa Lam, est sujette à de nombreuses théories du complot. Sans parler des millions de vues cumulées depuis sa mise en ligne. Pour comprendre la naissance de ce phénomène sordide, un bond en arrière s’impose.
Que s’est-il réellement passé ?
Tout commence par un séjour à Los Angeles. Étudiante à Vancouver, Elisa Lam, 21 ans et originaire de Hong Kong, s’offre un passage dans la Cité des Anges. Deux jours après son arrivée, le 28 janvier 2013, elle réserve une chambre au Stay on Main jusqu’à la fin du mois. L’hôtel est situé à Skid Row, un quartier malfamé de la ville. L’insécurité du lieu explique les petits prix de l’établissement qui attire majoritairement de jeunes touristes. En réalité, Elisa Lam séjourne au tristement célèbre Cecil Hotel – le nom a été changé en 2011 pour attirer plus de clients. Le lieu, construit en 1924, fut le théâtre de nombreuses scènes de crime, de violences conjugales, de suicides, mais fut aussi le repère de quelques tueurs en série, comme Richard Ramirez. La jeune femme ne sait pas encore qu’elle s’apprête à faire partie de l’histoire de l’hôtel.
Sous le pseudo Nouvelle-Nouveau, elle se livre sur son blog Tumblr personnel. Elle y partage des photos, des pensées du jour et ses anecdotes de voyage. L’un de ses derniers posts date du 29 janvier 2013, soit le lendemain de son arrivée dans l’hôtel. Très vite, ses parents ne reçoivent plus aucun signe de vie. Le 1er février 2013, alors qu’elle devait rendre les clés de sa réservation, Elisa Lam est introuvable. Pourtant, ses affaires occupent encore sa chambre. Katie Orphan, la gérante de la librairie The Last Bookstore, est l’une des dernières personnes à l’avoir rencontrée. Elle explique à CNN l’avoir trouvée « amicale » et « inquiète de ne pas pouvoir loger tous ses souvenirs de voyage dans sa valise« .
Des images effrayantes
Les parents d’Elisa Lam se rendent sur place. L’affaire commence à faire du bruit. Des affiches sont collées sur les poteaux et les murs de la ville. De son côté, la police enquête et visionne les caméras de surveillance de l’hôtel. La disparue apparaît dans l’une d’entre elles. Les images datent du 1er février 2013 et montrent Elisa Lam dans un ascenseur. C’est là que l’histoire prend une autre tournure. Elle adopte un comportement des plus curieux. Elle appuie sur tous les boutons, maintient la porte ouverte, fait des mouvements avec ses bras, se cache et enchaîne les va-et-vient. L’enquête n’avance pas et la police de Los Angeles décide, le 15 février 2013, de publier la vidéo sur son site.
En l’espace de quelques heures, elle est partagée partout dans le monde et attire des millions de vues. Beaucoup d’internautes se passionnent pour ce document étrange qui voit naître de folles théories. Certains parlent de possession, d’autres d’un tueur caché derrière le mur. Le destin d’Elisa Lam devient l’affaire de tout le monde et les enquêteurs amateurs sont prêts à tout pour trouver le fin mot de l’histoire. L’un des anciens clients de l’hôtel, Pablo Vergara, connu pour ses vidéos gothiques, est accusé de meurtre sans aucune preuve valable. Le FBI se rend même à son domicile pour lui poser des questions.
Le pouvoir des fake news
Sur YouTube, l’archive est commentée par les experts de faits divers et crée une vague de fake news qui se répandent à la vitesse grand V sur la Toile. Lorsque les clients de l’hôtel se plaignent du goût de l’eau, Santiago Lopez, chargé de la maintenance, se rend sur le toit. Il vérifie les réservoirs et découvre le corps nu d’Elisa Lam dans l’un d’entre eux. Ses vêtements – les mêmes que sur la vidéo – flottent à ses côtés. Une mauvaise information relance les rumeurs les plus folles. Par erreur, les médias précisent que la citerne était fermée et qu’il était impossible pour la jeune femme de pénétrer à l’intérieur. La théorie du meurtre est mise sur le tapis.
Grâce au documentaire Scène de crime : La Disparue du Cecil Hotel, les téléspectateurs apprennent que la porte du réservoir était bien ouverte. Elisa Lam, atteinte de troubles psychiques, s’est introduite dans la cuve pendant une crise avant de se noyer. Quant aux vêtements, les experts expliquent que la jeune femme s’est probablement déshabillée dans la panique. Son corps ne contenait, quant à lui, aucune trace d’attaque physique. Les autorités concluent à une mort par accident. Le documentaire de Netflix démontre la rapidité à laquelle les théories du complot peuvent nuire aux enquêtes en cours et aux vies des personnes impliquées. Aujourd’hui encore, de nombreuses personnes continuent de questionner la véracité des faits.