Krak et le dragon
Un rugissement terrible retentit dans l’air glacé. Toute la colline de Wawel trembla sur ses bases Comme tous les soir, le dragon avait faim !
Le monstre poussa son mufle baveux hors de la grotte, bâilla, s’étira puis, pataud, se mit en route vers le village.
Quand ils le virent approcher, se dandinant lentement d’une patte sur l’autre, les paysans s’enfuirent affolés en poussant leur troupeaux devant eux. Pourtant le dragon fut plus vif. En dépit de sa masse énorme, il accéléra, fit un bond prodigieux et s’empara de trois moutons qu’il croqua aussitôt. Il se lécha minutieusement les babines, passant sa longue langue fourchue sur ses poils de moustache, puis il repartit digérer au fond de son antre nauséabonde.
Depuis des années, ce dragon terrorisait toute la région, dévorant veaux, vaches, moutons, parfois femme ou enfants ! Las de vivre continuellement dans la peur, les hommes tinrent conseil. Après de longues discussions, ils résolurent de se débarrasser du dragon et firent donc appel à un courageux chevalier appelé Krak.
Celui-ci accepta sans hésiter cette dangereuse mission. Sous son commandement, tous les homme valides s’armèrent et, un matin, alors que le dragon digérait tranquillement une nouvelle proie, ils passèrent à l’attaque. Krak chargea en tête, en lançant son cri de guerre. Le dragon, surpris dans une douce somnolence, reçut une terrible volée de coups de lances, épées, haches…
Le monstre aurait dû mourir sur-le-champ, mais les hommes constatèrent que même les chocs les plus violents ébréchaient à peine ses épaisses écailles visqueuses. Furieux d’être ainsi dérangé, le monstre poussa un hurlement effroyable. Souple, le coup de griffe rapide en dépit de son aspect balourd, il cracha un rideau de feu sur ses adversaires et chargea à son tour. Aveuglés, brûlés, Krak et ses hommes durent reculer en désordre laissant plusieurs corps dans la grotte. A midi, le moral au plus bas, ils tinrent à nouveau conseil sur la colline de Wawel. Sous leurs pieds ils entendaient un sifflement rauque et régulier : la respiration du monstre !
Des vapeurs acres s’échappaient du sol.
Toute nouvelle attaque frontale était vouée à l’échec. Alors Krak demanda qu’on lui apporte la peau du plus beau bélier de la région ainsi qu’une forte quantité de salpêtre, de soufre, de gros sel… Sans donner d’explication, il emplit complètement la peau de ce mélange détonant, puis la fit soigneusement recoudre de manière à lui donner l’ apparence d’un véritable bélier.
A la tombée de la nuit, Krak chargea le faux animal en travers de son cheval et avança vers la grotte. Seul. D’une voix forte, il lança un défi.
Sors de ton antre, brute sanguinaire! Bats toi si tu l’oses !
Stupéfait d’être ainsi dérangé, le monstre se précipita hors de son repaire afin de voir à qui il avait affaire. Alors Krak éperonna son cheval, fonça vers lui au galop et lui jeta le bélier de toutes ses forces, juste devant la gueule. Glouton et peu subtil comme tous les dragons, le monstre saisit cette proie inattendue au vol et l’avala sans hésiter. Quelques minutes plus tard, son estomac commença à gonfler et une épaisse fumée jaunâtre lui sortit de la gueule. Il fut pris de terribles brûlures et d’une soif incroyable. Sans plus réfléchir, il se précipita vers la Vistule, plongea la tête dans le fleuve et but, but, but…
Il but tellement qu’il périt noyé!
La région était enfin débarrassée de ce monstre.
Pour fêter l’événement, Krak et les paysans organisèrent une grande fête puis ils bâtirent une puissante et belle ville sur la colline de Wawel.
En l’honneur du chevalier Krak on appela la ville… KRAKOW ! Cracovie en Français
Le coq et le trésor des oubliettes du palais Christophe à Cracovie
En face de l’église Notre-Dame de Cracovie, de l’autre côté de la place du marché, à l’angle de la rue Etienne, s’élève, un vieux et immense palais, qu’on appelle le palais Christophe. En dessous, de profondes oubliettes, des caves, des passages secrets s’étendent, paraît-il, sous toute la place, jusqu’à l’église Notre-Dame.Dans les oubliettes de ce palais, se produisaient, certains jour, toutes sortes de choses effrayantes .
On raconte, que le magicien-alchimiste Christophe, qui habitait cette demeure, il y a fort longtemps, aurait caché là, de l’or .
Cet or, serait surveillé par le diable lui-même, qui, une fois seulement, se serait manifesté aux yeux des hommes, et leur aurait même montré une petite partie du trésor .
Cela s’est passé de la manière suivante :
La cuisinière du palais, avait à préparer un bouillon, pour le repas. Mais, le coq qu’elle devait tuer, lui a échappé, et s’est enfui par l’escalier, dans les oubliettes.
La cuisinière l’a poursuivi, dans les couloirs souterrains, tant et si bien, qu’elle s’est perdue dans les ténèbres, et n’a pu retrouver la sortie .Alors qu’elle cherchait son chemin à tâtons, une lumière jaillit soudain, et la cuisinière aperçut le coq . Elle fut terriblement effrayée, parce qu’elle remarqua alors, que le coq portait des cornes sur la tête .
Le Coq-Diable, car c’était bien lui en réalité, lui dit d’une voix d’homme :
« Ne me tue pas, et je te donnerai tout l’or que tu pourras porter. Retourne en haut, et ne regarde pas derrière toi. »
Et, il lui remplit le tablier d’or.
La cuisinière, effrayée, rentrait par les souterrains, et devant elle, sautillait une petite flamme, qui lui éclairait le chemin. Elle se trouvait déjà, sur la dernière marche de l’escalier, quand, sa curiosité féminine prit le dessus, et elle se retourna.
A ce moment-là, la porte de la cave claqua, avec un tel fracas, que le palais en trembla, et la cuisinière fut même blessée au talon. Quant à l’or, qu’elle avait dans le tablier, il se transforma en poussière.
Et c’est ainsi, que le trésor du palais Christophe, est resté dans sa cachette. Les chroniques de Cracovie, nous indiquent, que depuis ce temps-là, personne n’est parvenu à le trouver .
Quelques années plus tard, une partie des oubliettes s’est écroulée, et a bouché les passages souterrains.
Il est donc possible, que ce trésor du Diable soit encore là aujourd’hui.
La bague de la princesse Cunégonde
Le prince de Cracovie , Boleslas le Honteux , désirait épouser la belle Cunégonde , fille de Béla , roi de Hongrie . Il envoya donc en Hongrie des émissaires pour demander la main de la princesse . Le roi Béla donna son accord aux épousailles et la princesse consentit volontiers .
Quand il fut question de la dot de la jeune promise , Cunégonde dit au roi :« Père , je ne veux ni or ni argent . Donne moi quelque chose qui dans mon nouveau pays servira à tous , tant aux riches qu’aux pauvres . »
Le roi Béla conduisit sa fille à la mine de sel qui apportait la prospérité aux Hongrois et dit :
« Voilà ma fille , un trésor précieux pour tous . Prends le avec toi . »
La princesse se réjouissait de pouvoir offrir du sel à la Pologne qui n’en avait pas du tout à cette époque là . Mais cela la préoccupa également beaucoup.
Comment emporter ce trésor en quantité suffisante pour tous ?
Elle se pencha au-dessus du puits profond et jeta dans ses profondeurs sa bague en or en soupirant tout bas :
« Plaise à Dieu que ce sel puisse m’accompagner en Pologne ! »
Cunégonde fit ses adieux à sa terre natale et se mit en route pour la Pologne avec un cortège d’émissaires polonais .
Après bien des jours de voyage , la princesse arriva au château royal du Wawel où eurent lieu les épousailles .
Peu après les noces , Cunégonde , accompagnée du prince , entreprit le tour de ses nouvelles terres .
Un jour , le cortège princier s’arrêta pour se reposer dans la bourgade de Wieliczka . Et à ce moment-là ,Cunégonde se souvint du sel, de ce cadeau en faveur de sa nouvelle patrie .
Elle enjoignit ses serviteurs de creuser à l’endroit qu’elle leur indiqua .
Ils ne peinèrent pas longtemps . Après quelques instants ; ils dégagèrent un gros bloc de sel . Puis Ils le brisèrent .
Quelque chose de doré se mit alors à scintiller.
La princesse se pencha et ô miracle ! Elle découvrit la bague qu’elle avait jeté dans la mine de sel en Hongrie .
Les serviteurs de la princesse creusaient avec ardeur , et , plus ils creusaient plus ils trouvaient de sel .
Bien des siècles se sont écoulés , et pourtant à Wieliczka et à Bochnia on extrait toujours du sel gemme , le cadeau de la princesse Cunégonde , qui rend service tant aux riches qu’aux pauvres .
Le tumulus de Krakus et la fête de Rekawka
Après bien des années de règne, mourut le bon et grand roi Krak, appelé aussi Krakus, celui-là même, qui a fondé la ville de Cracovie, au pied de la colline du Wawel.Le peuple porta le deuil de ce souverain bien-aimé et organisa, en son honneur, de magnifiques funérailles.
En face du Wawel, de l’autre côté de la Vistule, s’élèvent des falaises qu’on appelle Krzemionki.
Là, précisément sur le mont Lasota, on décida d’ensevelir le bon roi Krak.
Quand vint le moment de construire le tombeau, tout le monde, sans exception, participa au transport de la terre. Chacun acheminait la terre comme il pouvait: dans des paniers, dans des bottes, mais le plus souvent, dans les larges manches, que l’on portait en ce temps-là.
Le tumulus grandissait de plus en plus. Il devint, bientôt, un immense tombeau, qui dominait la ville. On l’appela le tumulus de Krakus.
Chaque printemps, les Cracoviens se rendaient au tumulus, pour honorer le souvenir du bon roi, en festoyant gaîment. On faisait cela, en souvenir du grand repas, qui avait été offert, lors des funérailles du bon roi Krak, pour remercier tous ceux, qui étaient venus le saluer, une dernière fois.
Au cours de la fête, les anciens jetaient du haut du tumulus: des œufs durs, des galettes, des gâteaux ronds, des petits pains, des pommes, des petits pains d’épices, directement dans les mains des étudiants, et des pauvres gens, qui se trouvaient en bas . Cette vénérable coutume, rappelant la légende du bon roi, et l’élévation du tumulus de Krakus, s’appelle la fête de REKAWKA .
Aujourd’hui encore, le lendemain du jour de Pâques, les habitants de Cracovie, se rendent sur la colline de Lasota, où comme autrefois, se déroule une fête populaire; et, sur les pentes de la colline, roulent des pommes et des pierniki, qui arrivent directement dans les mains des enfants, qui attendent tout en bas.
LA LEGENDE DES DEUX TOURS ET DES DEUX FRERES
L’orgueil de Cracovie, c’est l’église Notre-Dame, le magnifique sanctuaire sur la place du Marché, dédié à la très Sainte Vierge.
Cette église possède deux tours. A cela, rien de surprenant, si ce n’est que, l’une des tours est plus grande que l’autre. La plus haute, c’est la tour de la « fanfare » : c’est celle d’où retentit, toutes les heures, une sonnerie de clairon. La seconde, la plus basse, c’est le clocher de l’église, où est suspendue une grande cloche appelée « DemiSigismond*».
On raconte que c’est Stanislas Ciolek, le fils d’un voïvode de Mazovie, célèbre pour sa force extraordinaire, qui monta cette cloche sur son dos, jusqu’au sommet de la tour .
Mais pourquoi ces deux tours ne sont elles pas égales ? Pourquoi l’une est-elle plus basse que l’autre ?
Eh bien, ces deux tours ont été construites par deux frères, des maîtres maçons, très renommés en leur temps.
Ils travaillaient avec beaucoup d’ardeur, car chacun voulait être meilleur que l’autre, et construire le plus vite, la tour la plus haute .
Le frère aîné termina sa construction le premier. Mais il ne voulait pas, que la tour de son jeune frère, puisse égaler son œuvre.
Il saisit alors un grand couteau, et tua son frère. Mais, remporter une victoire, au prix d’un crime, n’offre pas de satisfaction. Les remords de sa conscience ne le laissèrent plus en paix. Il s’enfonça ,alors, dans le cœur, le couteau encore couvert du sang de son frère, et se jeta du sommet de la tour.
La tour du frère cadet resta inachevée, et c’est pour cela, qu’elle est plus basse .
Depuis ce jour, ce couteau est suspendu par une chaîne, dans la galerie de la Halle aux Draps, sur la place du Marché de Cracovie. Il est devenu le symbole de la jalousie criminelle. Il veut nous rappeler où peuvent mener la jalousie et la mésentente.
*Cette cloche s’appelle « Demi-Sigismond » parce qu’elle est deux fois moins lourde que la cloche « Sigismond » de l’église du Wawel, le palais royal de Cracovie.
LE CLAIRON DE L’EGLISE NOTRE DAME DE CRACOVIE
L’une des deux tours de l’église Notre Dame de Cracovie est la plus haute des tours de la ville.
A son sommet on peut voir de loin, une couronne dorée. Elle devait rappeler aux voyageurs qu’ils se rapprochaient de la capitale des rois de Pologne. C’est justement du haut de cette tour, nommée la « Tour de la Fanfare », que toutes les heures, l’on sonne le clairon, en direction des quatre points cardinaux.
La belle sonnerie s’interrompt toujours brutalement, comme si, elle était inachevée.
Pourquoi cela ?
Eh bien voilà ! Il y a des siècles, les hordes tartares attaquaient fréquemment les villes et les villages polonais.
Les maisons étaient incendiées ; les habitants étaient dépouillés de leurs biens et certains emmenés en captivité.
Il arrivait que ces attaques aillent jusqu’à Cracovie.
Une sentinelle veillait en permanence sur une tour de Notre dame, et, par une sonnerie de clairon, elle donnait le signal d’ouvrir ou de fermer les portes de la ville. Elle signalait également les incendies et la présence d’un ennemi.
Un jour que les Tartares s’approchaient de la ville, la vigilante sentinelle se mit à sonner l’alarme. Soudain une flèche tartare lui transperça le cou et la sonnerie s’interrompit tout net.
Cependant, les habitants de Cracovie, mis en alerte, fermèrent les portes de la ville, montèrent sur les remparts et repoussèrent les violentes attaques des Tartares.
Depuis ce temps là, la sonnerie de la « Tour de la Fanfare » ne fut plus jamais jouée complètement.
La sonnerie s’arrête toujours brutalement ; aussi soudainement que s’est arrêtée la vie du joueur de clairon dont le cou fut transpercé par une flèche tartare.
LE ROCHER DES VIERGES
Le cloître des Demoiselles du JARDIN, avait des murs très épais, de puissantes portes bardées de fer, de sombres basses fosses, qui le reliaient à la forêt WOLSKI .
C’était une véritable place forte.
Pourtant, il n’a pas toujours protégé efficacement les religieuses, des invasions Tartares.
Une fois, il est arrivé que les Tartares attaquent le cloître, par surprise, avec un telle violence, que les portes ont cédé .
Les flammes de l’incendie qui s’est déclaré, se sont élevées jusqu’au dessus du toit de l’église.
Les sœurs ne durent leur salut que dans la fuite.
Elles se sauvèrent, par de tortueux couloirs souterrains, qui s’étendaient profondément sous la forêt, jusqu’au coteau d’une lointaine montagne .
Cependant, les Tartares découvrirent rapidement l’entrée secrète des basses fosses, et ils poursuivirent avec rage les sœurs prémontées .
Les Demoiselles du JARDIN entrèrent en courant dans la forêt, et se cachèrent dans une petite chapelle, au milieu des arbres, et de quelques rochers de calcaire blanc .Les Tartares les suivaient de très près .
C’est alors, que la petite chapelle s’est enfoncée sous terre, avec toutes ses moniales . Les rochers blancs se mirent à rouler; ils obstruèrent le chemin, et empêchèrent le passage des barbares .
Depuis ce temps-là, cet endroit porte le nom de ROCHER DES VIERGES .
LA DAME EN NOIR
Il existe à Cracovie, une colline appelée « La Brigandine ». Ce nom curieux cache quelque chose de mystérieux, et de menaçant. En fait, la colline s’appelle ainsi, parce qu’elle était autrefois, un repaire de brigands . Elle se trouvait sur la route, allant de Cracovie jusqu’en Hongrie. De riches commerçants l’empruntaient, pour transporter de précieuses marchandises qui, souvent, tombaient entre les mains de ces fameux brigands.
Il y avait également là, une sombre auberge, où tous ces voleurs se rassemblaient, pour boire, manger et festoyer bruyamment, à la manière des fripons .
Une belle princesse vivait non loin de là. Elle possédait un magnifique manoir, de beaux jardins, de nombreux domestiques, des coffrets pleins de bijoux, de la vaisselle d’or fin….En un mot, tout ce qu’elle possédait, c’était ce qu’il y avait de mieux, excepté son cœur, qui était dur et mauvais .
Ses propres trésors ne lui suffisaient pas. Cette princesse, avide et brutale, prenait tout ce que les paysans gagnaient, à la sueur de leur front. Elle ne leur laissait pas le moindre sou .
Elle menait grand train, mais elle ne pouvait pas vivre éternellement. Une nuit, le ciel se couvrit de lourds nuages noirs, la foudre tonna, et un orage se déchaîna. Et c’est dans une telle nuit d’épouvante, que la méchante princesse mourut. Bientôt, d’étranges rumeurs commencèrent à se répandre. On disait, que le manoir abandonné de la méchante princesse, était hanté, et que des choses extraordinaires s’y passaient .
On détruisit donc le manoir, et on construisit à sa place, une petite église .
Cela ne servit à rien .Chaque nuit, on entendait dans la petite église, des sanglots, des pleurs, et des gémissements. Certains avaient même vu une Dame en Noir, qui rôdait la nuit, dans les environs .
Un ermite qui habitait par là, apprit tout cela. Il vint une nuit près de l’église, et rencontra la Dame en Noir, qui lui dit :
« je suis une princesse; je possédais ici un magnifique manoir et je vivais dans la richesse. Mais j’étais méchante, j’avais un cœur dur comme de la pierre, et maintenant, après ma mort, je souffre d’indicibles tourments. Mes souffrances ne prendront fin, que si, un homme ou une femme réussit, pendant un an et six dimanches, à dépenser, sans l’aide de qui que ce soit, cent écus d’argent, chaque jour. Aide moi, cher ermite, sinon je continuerai à souffrir sans fin . »
L’ermite eut pitié de la Dame en Noir, et décida de l’aider. Justement, un vieux soldat, solitaire et misérable, était revenu de la guerre. L’ermite lui demanda, s’il voulait bien, soulager les souffrances de la méchante princesse. Le vieux soldat accepta. A partir de ce moment là, il vint chercher, chaque jour, sous le seuil de la petite église, cent écus d’argent .
Il buvait les vins les plus chers, mangeaient les pâtés les plus raffinés, les fruits les plus rares, et des friandises multiples et variées.
Il passa ainsi une longue année, et six dimanches, dans une grande Tristesse, car des festins pris dans la solitude, et sans amis, ne rendent pas heureux. Le dernier jour, après un plantureux repas, il rentrait à la maison, heureux d’en avoir bientôt terminé.
C’est alors, qu’il rencontra sur le pont de la Vistule, un mendiant terriblement amaigri. Il eut pitié de lui, et lui donna le dernier écu qui lui restait .Mais, c’était le diable en personne.
Aussitôt, une tornade se déclencha, en sifflant et en hurlant. Et un violent tourbillon emporta le vieux soldat, si loin, que jusqu’à ce jour, personne ne l’a revu à la « Brigandine ».
Quant à la princesse, la Dame en Noir, elle continue à souffrir mille tourments, en attendant celui ou celle, qui acceptera de la sauver .
La tête de Wawel
Il y a cinq siècles, les maîtres sculpteurs Jan Snycerz et Sebastien Tauerbach réalisèrent des dizaines de têtes de pierre dans les caissons du plafond de la salle des députés du château Wawel. Contemplant les visiteurs, elles furent donc témoin de nombreux événements historiques. Elles assistèrent à l’accueil des rois étrangers, sessions et conseils du tribunal royal. Sous le règne de Sigismond Auguste, il advint quelque chose d’extraordinaire. L’une des têtes sculptées pris la parole pour défendre une femme accusée injustement.
Un habitant de Cracovie accusait cette femme, une veuve, de lui avoir volé une ceinture brodée d’or et d’argent. Il prétendait lui avoir repris des mains sous l’oeil de nombreux témoins se trouvant sur la place, ce qui devait la faire condamner à la prison. Elle essayait pourtant d’expliquer qu’un voleur avait jeter cet objet à ses pieds quand il vit qu’il était poursuivi, et qu’elle s’en était saisi pour le rendre à son propriétaire, mais cela ne suffisait pas à convaincre le tribunal. Le roi, sur le point de demander depuis son trône le verdict d’un simple mouvement de sceptre, fut interrompu par une voix ferme venant du plafond qui retentit dans toute la salle : » Rex Auguste, iudica juste » c’est à dire ‘ »Roi Auguste, rend la sentence juste ». A l’étonnement des gens devant une telle opposition faite au roi, succéda celle de découvrir, lorsque les regards s’élevèrent vers le plafond, qu’une des têtes sculptées remuait encore les lèvres. Dès lors plus personne ne douta de l’innocence de la veuve, qui fut dédommagée de la fausse accusation.
Toutefois, il fut ordonné aux sculpteurs de placer un morceau de bois entre les lèvres de la tête afin qu’elle cesse d’intervenir dans les jugements du roi.
Le tribunal a depuis longtemps disparu du château Wawel, mais la tête sculptée est toujours là.
Le pacte du Maître Tardowski
Fondée en 1364 par le roi Casimir le Grand, l’Université de Cracovie devint après quelques rénovations par le reine Hedvige et son mai Jagiello l’université Jagellonne. Au XVème siècle, l’Université possédait une importante chaire d’astrologues. On venait des quatre coins du monde pour étudier des sciences secrètes et obscures. Cracovie débordait de spécialistes de magie blanche et magie noire venus du monde entier. Il était également possible d’étudier ces sciences dans des ateliers privés. Le meilleur d’entre eux était celui de Piotr Twardowski, le plus grand magicien de Pologne. Il reçu un jour la visite d’un de ses collègues allemands et discutèrent très longuement des mystères du monde et de la façon dont ils avaient acquis leurs pouvoirs. Tous deux les avaient acquis en invoquant le diable par une nuit de pleine lune. Après avoir signé de leur sang un contrat avec celui-ci, les forces du mal devaient leur obéir. Ils avaient dû préciser pour chacun d’eux le lieu de leur mort. Le diable s’emparerait alors de leur âme. Twardowski indiqua que le diable l’emmènera lorsqu’il serait à Rome, tout en sachant qu’il n’avait aucune intention d’aller en Italie. Il pensait ainsi pouvoir bénéficier indéfiniment des puissances démoniaques. Ceux-ci lui préparaient cependant un piège.
Twardowski devint célèbre, tout lui souriait, il réalisait ses incroyables tours de magie devant le roi Sigismond Auguste. Le roi souffrait beaucoup de la disparition de sa femme Barbara. Le magicien lui proposa de faire revenir l’âme de la reine de l’au-delà. Ils durent attendre une nuit de pleine et commencèrent la cérémonie. Twardowski plaça un miroir dans un coin de la chambre de la défunte pour recevoir le reflet de la lune. Il jetait des herbes dans un bassin de métal placé au milieu de la pièce sur un trépied. Des bougies de cire d’abeille étaient allumées sur la table à côté d’épais grimoires. Il prononçait des formules magiques et demanda au roi de ne surtout pas bouger à la vue du fantôme et de garder le silence, car un contact pouvait entraîner la folie ou même la mort. Ses mots magiques, incompréhensibles, résonnaient dans la pièce alors qu’une odeur intense se dégageait des herbes brûlant dans leur bassin. La lune apparût derrière la fenêtre ; une lueur bleue argentée emplit la pièce. Les formules au départ incompréhensibles devinrent mélodieuses. Le roi vit des nuages sortir de la surface du miroir; la silhouette de la reine rn sortit. Elle alla à la fenêtre et se retourna vers son mari. Celui-ci, oubliant la consigne du magicien, sauta de son fauteuil pour courir vers le spectre, qui passa à travers la fenêtre et disparu dans la nuit.
Le diable en ayant assez d’obéir à Twardowski, il chercha un moyen de le faire partir vers Rome, l’endroit désigné pour être celui de la fin de vie du magicien. Il dut ruser.
Un soir, Twardowski, revint des villages de la région où il avait utilisé ses pouvoirs dans un but médical. Il rêvait à cet instant de s’arrêter dans une auberge et curieusement, il en vit une, à ce moment précis. Il entra et s’assit à une table. En relevant la tête, il découvrit qu’il se trouvait devant le diable, qui lui annonça que cette auberge se nommait Rome, et que son heure était donc venue. Les démons se jetèrent sur lui dans un rire triomphal. Ils le tiraient dans tous les sens par ses vêtements et l’emmenèrent par la cheminée vers le ciel. En altitude, toujours accompagné des démons, il vit en desous de lui la place du marché de Cracovie. Il entendit aussi le son de la trompette et montait vers lui. Ce spectacle apaisa l’âme tourmentée du magicien et éleva ses pensées. Les démons perdirent alors tout pouvoir sur son âme. Cependant ses actes de sorcelleries passés ne lui permirent pas de s’élever beaucoup plus haut. Il était condamné à rester entre le Ciel et la Terre pour les déséquilibres qu’il avait provoqués ; il dût rester sur la Lune. De là, par des nuits sans nuage, il peut parfois contempler la ville de Cracovie dans toute sa beauté. Il aperçoit des femmes racontant son histoire à leurs enfants, et ceux-ci lèvent les yeux vers le ciel pour tenter de voir le grand magicien sur la surface de la lune.
Texte copié avec l’aimable autorisation du Club Franco-Polonais de Louviers – Val de Reuil n’hesitez pas a aller les visiter,les 2 derniers articles proviennent du site http://www.mapologne.fr