Francis Heaulme, né le 25 février 1959 à Metz, est un tueur en série français, surnommé le « Routard du crime », reconnu coupable de neuf meurtres dans au moins huit affaires et arrêté par le gendarme Jean-François Abgrall.
Francis Heaulme a grandi à Briey en Meurthe-et-Moselle dans une des quatre Cité radieuse construites par Le Corbusier. Son père Marcel est électricien, alcoolique, ayant un accent alsacien très prononcé, volage et violent envers tous les membres du foyer, surtout envers Francis, dilapide une grande part de son salaire dans les courses de chevaux. Francis adore sa mère Nicole (née Houillon) qui est pour lui « une sainte ». Il s’entend très bien avec sa sœur Christine de 6 ans sa cadette. Les deux enfants sont souvent livrés à eux-mêmes dans le logement familial. Francis est surnommé « Félix le chat », car il lui est arrivé plusieurs fois de se nourrir de pâtée pour chat en boîtes de conserve. De nombreuses personnes l’appellent « Félix » croyant que c’est son vrai prénom. Heaulme est atteint du syndrome de Klinefelter : sa pilosité est moindre, ses organes reproductifs sont de petite taille et son quotient intellectuel inférieur à la moyenne.
À cause de cette apparence féminine il subissait les railleries et les coups de son père qui l’enfermait à la cave. Ce chromosome en plus lui donne également une plus grande taille que ses proches, il mesure 1,90 m. Il devient alcoolique et déséquilibré durant son adolescence, ce qui l’a poussé à parfois enterrer des animaux vivants ou à se taillader régulièrement le corps avec des tessons de bouteille. Il est exempté de service militaire pour cause de problème psychiatrique. À 20 ans il se découvre une passion pour le vélo à laquelle il s’adonne en tenue de cycliste. Il n’a pas passé le permis de conduire et n’a jamais conduit de voiture. Sa mère meurt d’un cancer le 16 octobre 1984. Il en est dévasté et tente de se suicider à plusieurs reprises. La mort de sa mère ayant eu lieu le même jour que celle de Grégory Villemin, il collectionne les coupures de presse sur cette affaire.
Il commet son premier meurtre le 5 novembre 1984, trois semaines après la mort de sa mère. Avec la complicité de Joseph Molins, il tue Lyonnelle Gineste, 17 ans, apprentie pâtissière, car « elle avait l’air d’une pute avec ses collants noirs ». Son père a une nouvelle compagne et sa sœur se marie. Francis Heaulme perd son emploi de maçon à cause de son alcoolisme. En 1986 il va habiter chez sa grand-mère à Vaux, près de Montigny-lès-Metz où le 28 septembre 1986 deux enfants sont tués. Heaulme travaille comme manœuvre pour l’entreprise CTBE à seulement 400 mètres. Ce jour là, il avoue seulement avoir vu ces enfants lorsque ceux-ci lui ont jeté des pierres alors qu’il passait à vélo. Cette affaire non élucidée pourrait être son deuxième passage à l’acte au vu de ces nombreux indices comme le mode opératoire (ils sont tués à coups de pierre, une des techniques de Heaulme). Patrick Dils sera emprisonné plusieurs années avant d’être acquitté de ce double meurtre. En décembre 1986 avec deux amis du centre de désintoxication de Maizeroy près de Metz, il tue Annick Maurice, une autostoppeuse. Ensuite en 1987, il part sur les routes, se marginalise et sillonne la France à pied, en stop et en train sans billets, séjournant dans des communautés Emmaüs et des institutions psychiatriques ou de désintoxication.
Il dépense son revenu minimum à boire, mélangeant parfois alcools et tranquillisants, et trouve occasionnellement des petits boulots de ferrailleur ou de maçon. En 1989 il devient compagnon d’Emmaüs, successivement dans trois communautés de France (Brest, Quimperlé, puis Metz). Il traverse, en huit ans, 37 départements et, incapable de conduire, entraîne plusieurs fois des complices dans ses crimes (dont le cousin d’une des victimes), eux violant la victime, lui toujours à l’initiative des meurtres la tuant. Il lui arrive de s’accuser de meurtres auprès de personnels médicaux qui ne le croient pas, parce qu’il est trop habitué aux affabulations. Dans plusieurs gendarmeries, il raconte des agressions « imaginaires ».
À la suite du meurtre d’Aline Pérès une aide-soignante le dimanche 14 mai 1989 sur la plage du Moulin-Blanc au Relecq-Kerhuon, non loin de Brest, le gendarme de permanence Jean-François Abgrall, de la section de recherches de Rennes prend en charge l’enquête. Le gendarme mène ses investigations qui le conduisent à Francis Heaulme avec lequel il parvient à établir le contact. Malgré le peu de soutien de sa hiérarchie, Abgrall a rapidement compris la règle de base concernant celui qu’il est chargé de traquer : « C’est quand on ne lui demande rien qu’il en dit le plus ». Pendant qu’Abgrall mène son enquête, Heaulme réalise d’autres meurtres. Sa dernière victime connue est Jean Rémy, retraité, rencontré à Boulogne-sur-Mer le 5 janvier 1992.
Il est enfin arrêté le 7 janvier 1992, à Bischwiller en Alsace, et avoue le meurtre de l’aide soignante de Brest, puis, dans l’attente de passer devant le juge d’instruction, celui de Jean-Joseph Clément, près d’Avignon le 7 août 1989. Les enquêteurs ont beaucoup de difficultés à confirmer les autres crimes, car les actes sont perpétrés sans raison ni mobile apparents par une personne très mobile. De plus des négligences, des lacunes et la mauvaise coordination des différents services d’enquête locaux ne permettent pas de le confondre. C’est finalement Abgrallqui remonte le fil des meurtres au gré des déplacements de Heaulme et, centralisant les différentes enquêtes, obtient progressivement une série d’aveux plus ou moins explicites mais dans des termes confus et codés, Heaulme parlant d’une quinzaine de « pépins ».
Francis Heaulme raconte avec une incroyable précision des scènes de meurtre, mais en disant se les être fait raconter, les avoir vues en songe, sans dire qu’il y a participé. Par exemple, il mime la façon de tuer une sentinelle en lui tenant fermement la tête en arrière d’une main et en lui tranchant la carotide de l’autre, ou les dessine, puis se rétracte. Selon Abgrall, « Il ne ment pas. Il n’invente jamais rien. Mais il embrouille volontairement les pistes en mélangeant les crimes, les dates et les lieux ». En 1993, une cellule spéciale de gendarmerie est créée sous la direction d’Abgrall appuyé par un technicien de l’Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale pour démêler l’écheveau des pérégrinations criminelles de Heaulme, de ses souvenirs et de ses aveux confus. Depuis son premier passage aux assises en 1994 pour la mort de l’aide-soignante, les procès se succèdent et il est condamné à huit reprises pour neuf meurtres jusqu’en 2014, où il répond à nouveau en assises des meurtres de deux jeunes garçons en 1986 à Montigny-lès-Metz, qui ont été précédemment imputés à tort à Patrick Dils, dans une retentissante erreur judiciaire. Francis Heaulme est incarcéré à la maison centrale d’Ensisheim, dans le Haut-Rhin, spécialisée dans l’accueil de détenus de longue peine, dont 30 % sont condamnés à la perpétuité.
Liste des victimes connues
- 6 novembre 1984 – 5 novembre 1984 – Lyonelle Gineste – 17 – Montauville – complice Joseph Molins
- 22 juin 1988 – 22 juin 1988 – Georgette Manesse – 86 – Charleville-Mézières
- 22 juin 1988 – 22 juin 1988 – Ghislaine Ponsard – Charleville-Mézières
- 5 janvier 1992 – 5 janvier 1992 – Jean Rémy – 65 – Boulogne-sur-Mer
Les affaires dans lesquelles il est soupçonné, mis en examen ou condamné sont nombreuses :
- condamné pour le meurtre de Lyonnelle Gineste (17 ans) dans la forêt de Puvenelle à Montauville, le 5 novembre 1984, soit 3 semaines après la mort de sa mère. Il est aidé d’un complice, Joseph Molins qui s’est révélé au fil de l’histoire être un témoin.
- jugé pour le meurtre dans un gymnase à Périgueux le 8 mai 1986 de Laurent Bureau (19 ans) appelé du contingent. Des complices accompagnent Heaulme, dont Didier Gentil, déjà condamné au moment du procès à la réclusion à perpétuité pour le viol et le meurtre de la petite Céline Jourdan, à la Motte-du-Caire, en juillet 1988. La cour d’assises de Périgueux ne pouvant déterminer lequel des deux meurtriers a tué Laurent Bureau, ils sont acquittés le 5 avril 1997.
- Heaulme a été mis en examen pour les meurtres des petits Cyril Beining et Alexandre Beckrich, le 28 septembre 1986 à Montigny-lès-Metz (Moselle), Heaulme avait été embauché quelques jours auparavant dans une entreprise toute proche des lieux du crime. Il a confirmé avoir été présent ce jour-là mais nie avoir tué les deux garçons. Sa présence sur les lieux a été un motif suffisant pour faire acquitter Patrick Dils, condamné 10 ans auparavant pour ces faits. Patrick Dils a été libéré et déclaré non coupable le 24 avril 2002. En mars 2013, Heaulme est renvoyé devant une Cour d’Assises pour répondre de ces deux meurtres au cours d’un procès ajourné en avril 2014 sur la possibilité d’un autre meurtrier, Henri Leclaire.
- condamné pour le meurtre d’Annick Maurice (26 ans), employée d’un hypermarché de Metz, le 29 décembre 1986 dans un bois d’Ogy avec la complicité de Philippe Elivon. Le corps de la victime est retrouvé le 27 avril 1987.
- condamné pour le double meurtre à coups de couteau de Ghislaine Ponsard, 61 ans, et Georgette Manesse, 86 ans, le 22 juin 1988 à Charleville-Mézières dans la maison de Georgette Manesse. Il avait avoué ces meurtres aux enquêteurs avant de se rétracter, il a nié pendant tout le procès.
- condamné pour le meurtre du belge Joris Viville (9 ans) enlevé dans un camping à Port-Grimaud le 5 avril 1989, étranglé et poignardé de 83 coups de tournevis. Son corps est retrouvé derrière une citerne le 22 avril 1989. Heaulme est accompagné d’un complice car le corps a été déplacé de plus de 20 kilomètres en voiture. Confronté à cinq suspects possibles lors du procès, il les désigna tous successivement comme complice, avant de déclarer qu’il ne voulait pas être le « bouclier émissaire », et fut condamné, seul, à la réclusion à perpétuité.
- condamné pour le meurtre d’Aline Pérès, 49 ans, au Relecq-Kerhuon le 14 mai 1989, à vingt ans de réclusion criminelle. C’est d’ailleurs pour ce meurtre qu’il sera arrêté à Bischwiller, quatre ans plus tard.
- condamné pour le meurtre de Sylvie Rossi, 30 ans, hôtesse de bar qui l’avait pris en stop à Reims le 18 juillet 1989 alors qu’elle retournait chez elle à Épernay. Heaulme rentre chez lui à Metz et exige qu’elle l’y conduise. Elle refuse, il la roue de coups, elle arrête sa voiture à Villers-Allerand, s’échappe de la voiture sur un chemin agricole, Heaulme la poursuit en continuant de la frapper. Son corps nu est découvert le 19 juillet 1989. Le coup de pied fatal est celui qui a fait éclater son foie.
- soupçonné du meurtre Jean-Joseph Clément, 60 ans, légionnaire retraité agriculteur à Courthézon, le 7 août 1989 pour lequel il bénéficie d’un non-lieu. Bien que Heaulme ait avoué ce meurtre au gendarme Abgrall, sa présence sur les lieux du crime n’a jamais pu être avérée. De plus, ses aveux semblaient totalement fantaisistes, en regard des constatations effectuées par les gendarmes sur la scène de crime.
- condamné pour le meurtre le 7 mai 1991 de Laurence Guillaume (14 ans) dans les environs de Metz, à la réclusion criminelle à perpétuité. Michel Guillaume son complice, cousin de sa victime, reconnu coupable de viol et de complicité de meurtre, est condamné à 18 ans de prison.
- condamné pour le meurtre de Jean Rémy (65 ans), le 5 janvier 1992 à Boulogne-sur-Mer.
Condamnations
Le 29 janvier 1994 la cour d’assises de Quimper le condamne à 20 ans de réclusion criminelle assortis d’une période de sûreté des deux tiers, pour le meurtre d’Aline Pérès au Relecq-Kerhuon le 14 mai 1989 grâce au témoignage de Philippe Delorme que Heaulme surnomme « le gaulois » SDF qui l’accompagnait et a assisté au début de l’agression.
Le 29 septembre 1995 la cour d’assises de Metz, le condamne à la réclusion criminelle à perpétuité assortie d’une période de sûreté de 18 ans pour complicité de viol et meurtre de Laurence Guillaume le 7 mai 1991.
Le 24 mai 1997 la cour d’assises de Draguignan le condamne à la réclusion criminelle à perpétuité, assortie d’une période de sûreté de 22 ans, pour le meurtre de Joris Viville à Port-Grimaud le 5 avril 1989.
Le 9 septembre 1999 la cour d’assises de Saint-Omer le condamne à 15 ans de réclusion criminelle pour le meurtre de Jean Rémy le 5 janvier 1992 à Boulogne-sur-Mer.
Le 26 novembre 1999 la cour d’assises de Nancy le condamne à 30 ans de réclusion criminelle pour le meurtre de Lyonelle Gineste, le 5 novembre 1984. Son complice, Joseph Molins (dénoncé par Francis Heaulme en 1996) fut condamné à 10 ans de réclusion criminelle pour complicité de meurtre.
Le 8 décembre 2001 la cour d’assises de Metz le condamne à 30 ans de réclusion criminelle pour le meurtre d’Annick Maurice le 29 décembre 1986 à Metz. Le coaccusé du tueur en série, Philippe Elivon, est condamné à 15 ans de réclusion. Ces condamnations sont confirmées en appel par la cour d’assises de Nancy en novembre 2002.
Le 16 décembre 2004, il est condamné par la cour d’assises de Reims à une peine de 30 ans de réclusion criminelle, assortie d’une période de sûreté de 20 ans, pour les meurtres de Sylvie Rossi le 18 juillet 1989 à Villers-Allerand, et de Ghislaine Ponsard et Georgette Manesse le 22 juin 1988 à Charleville-Mézières.